Fnac contre Amazon : On ne perdra pas 15 % de TVA contre Amazon sur l'ebook / Livres
ActuaLitté vient de publier un entretien exclusif, faisant état de la guerre autour de la TVA que Fnac est prêt à livrer contre Amazon. Les avantages fiscaux accordés par le Luxembourg au cybermarchand sont peu du goût de Fnac, notamment concernant le livre numérique.
En marge de la présentation du nouveau lecteur ebook, Kobo by Fnac, la distributeur de produits culturels n'a pas manqué d'évoquer les questions de TVA qui obsèdent le secteur de l'édition, pour le livre numérique. En effet, le livre papier est taxé à 5,5 %, alors que le livre numérique est, lui, taxé à 19,6 %. Si Jacques Toubon a promis que la TVA du livre numérique serait fixée à 5,5 % pour le 1er janvier 2012, Fnac est décidée à ne pas laisser Amazon ni les autres ebookstores lui marcher sur la taxe.
Sauf qu'entre temps, la joyeuse nouvelle portée par François Fillon de faire remonter la TVA à taux réduit sur certains secteurs en bénéficiant s'est fait jour. On passerait ainsi d'une TVA de 5,5 % à 7 % pour le livre papier. Et s'il est question d'harmoniser les TVA pour les livres, numériques et papier en France, alors l'ebook serait taxé à 7 %.
TVA de l'ebook négociée entre le Luxembourg et Amazon ?
Or, Amazon est une société basée au Luxembourg. Et la situation pour l'entreprise serait particulièrement confortable, puisque le pays proposerait, dans le cas du livre numérique, une forme de TVA hybride. En 2010, le sénateur Philippe Marini présentait à ce titre une Proposition de résolution sur l'application du principe de subsidiarité en matière de TVA.
Il y soulevait notamment quelques éléments puisés dans le Livre vert de la Commission européenne, « consciente de l'incohérence de la situation actuelle ». En effet, l'UE elle-même avouait qu'« il subsiste des incohérences dans les taux de TVA appliqués à des biens ou services comparables ». Et pour preuve, elle prenait le cas de certains ÂEtats membres, « appliquant un taux réduit à certains biens culturels, mais devant appliquer le taux normal aux services en ligne concurrents de ces biens, comme les livres ou les journaux électroniques ». (http://www.senat.fr/rap/l10-550/l10-5505.html#toc37 )
Parmi ces Etats, donc, le Luxembourg, qui aurait donc négocié un taux de TVA avec Amazon entre 5 et 6 % sur certains biens et services, dont le livre numérique. De quoi créer à l'heure actuelle une distorsion réelle de concurrence, mais surtout, faire enrager les éditeurs français qui se battent pour une TVA à taux réduit sur le livre numérique, contre l'Union européenne elle-même.
Bruxelles, silencieuse ou dans les choux ?
Dans ce contexte, il y a de quoi devenir chèvre, à voir que le Luxembourg pourrait accorder un taux réduit à une société, sans que Bruxelles ne moufte, alors que ce même taux est refusé à un Etat, avec les difficultés que l'on connaît.
En effet, depuis Bruxelles, on entendait qu'en effet, « une option qui permettrait aux Etats membres d'appliquer le taux réduit de TVA aux e-books générerait une concurrence fiscale destructrice dans ce domaine : tous les vendeurs organiseraient leurs ventes pour pouvoir les faire du pays dans lequel le taux réduit de TVA est le plus bas ». Raison pour laquelle la France se ferait refuser un taux réduit sur le livre numérique.
L'économie de l'immatériel, permise par la présence de multinationale, principalement étasunienne, dans le cas du livre numérique, aurait, elle aussi, deux poids de mesures.
On ne perdra pas 15 points de TVA pour de mauvaises raisons
Dans ce contexte, Fnac n'avait pas manqué le coche : le distributeur français n'entend pas supporter une situation dans laquelle il devrait perdre 15 sur la TVA, par rapport à Amazon. « Ce cas-là n'existera pas », nous précisait-on.
« Soit on dispose d'une TVA qui est la même pour tous, soit certains s'en affranchissent, et il y a une anomalie. Et quelle que soit la réponse, en aucun cas, nous ne nous alignerons pas sur ce que va proposer Amazon. On ne se prendra pas, pour de mauvaises raisons, 15 points de différence par rapport à notre principal concurrent. Et si Amazon est bien situé au Luxembourg, il ne vous aura pas échappé que Kobo est une entreprise d'origine étrangère. »
Des propos clairs, mais pas de menace : « Nous souhaitons tout d'abord que la loi soit la même pour tout le monde. Aujourd'hui, une législation qui pénaliserait le premier libraire français, ce serait un avantage accordé à notre premier concurrent américain, ça ne fait pas sens. »
« Soit la TVA est la même pour tous, et la loi s'applique à tous, soit on a une TVA à deux vitesses, et dans ce cas, nous ne nous laisserons pas faire. »